La gestion des ravitaillements lors d’un trail
Chaque discipline est différente, le trail n’y échappe pas et propose un panel très large de courses entre celles ayant une dénivellation importante (ou non), une distance plus ou moins longue, des conditions climatiques différentes (un trail nocture fin février en Bretagne ou un trail mi Août dans le PACA)… Tous ces critères jouent forcément sur la préparation physique mais doivent également influer sur votre ravitaillement au trail.
Sommaire
Spécificités du trail qui jouent sur le ravitaillement
Tous les trails proposent des courses en semi autonomie avec des ravitaillements très espacés (au mieux toutes les heures de course), ce qui fait qu’il y a une forte présence de ceintures porte-bidon ou de poches à eau (type Camel Bag) et ce n’est pas pour me déplaire. Les sportifs de haut niveau partent avec le minimum obligatoire souvent imposé par l’organisation mais pour nous, autres traileurs et traileuses, nous partons avec des réserves. Du coup, le ravitaillement au trail comprend à la fois ce qui est présent sur nous mais également les produits présents sur les ravitaillements gérés par l’organisation.
Quel est le meilleur ravitaillement lors d’un trail ?
L’idéal serait de personnaliser en fonction des trails mais cet article sur le ravitaillement trail étant assez large, je vais diviser en fonction du temps de course et de la dénivellation. Petit lexique :
- trail court = < 6h d’effort (et oui, je parle en temps de course et non en km !),
- trail long = > 6h d’effort,
- faible dénivellation = < 1 km D+,
- forte dénivellation = > 1 km D+.
Qu’est-ce que la base pour un ravitaillement lors d’un trail ?
Il faut boire 500ml de boisson énergétique par heure mais cela restera cependant un minima, éviter les gels énergétiques tandis que les barres énergétiques sont plus réservées sur du long (> 4h). Buvez peu mais fréquemment plutôt que beaucoup d’un coup pour des raisons de confort digestif : buvez 2 à 3 gorgées toutes les 10min (n’hésitez pas à programmer votre montre). Tout ce qui va être consommé doit impérativement être testé à l’entraînement et en condition réelle notamment lors de sorties longues pour ne pas être surpris le jour J.
Ravitaillement trail court à faible dénivellation
A mon sens, il n’y a aucune spécificité si ce n’est de respecter la base. Sur les ravitaillements de l’organisation, je vous conseille de ne rien prendre.
Ravitaillement trail court à forte dénivellation
Il y a toujours la base à respecter. Les successions de montées/descentes vont fortement jouer sur vos fibres musculaires. Partant de ce constat, je vous conseille de consommer au bout de 2h-2h30 de course (idéalement durant une descente) 1 dose de boisson de récupération en lieu et place de votre boisson énergétique.
Pourquoi consommer une boisson de récupération durant l’effort ?
Les boissons de récupération ont, pour la majorité d’entre elles, des glucides, vitamines (B, C…) et minéraux type sodium, potassium, magnésium… mais surtout des protéines. Les protéines participent à une minoration de la casse musculaire (ou lyse musculaire) en gros et ainsi, cette prise de boisson de récupération pendant l’effort va vous permettre de prévenir la fatigue musculaire. Attention, je ne dis pas que vous allez préserver votre état de forme de début de course tout au long de l’épreuve, mais les protéines bien assimilées vont aider à mieux perdurer pendant l’effort . D’autant plus que les glucides contenus dans la boisson de récupération serviront de carburant énergétique en parallèle.
Ravitaillement trail long à faible dénivellation
Ces courses sont moins fréquentes, elles peuvent être prises selon moi sur le principe d’un 100km sur route. Il faut respecter les bases et inclure la prise d’une boisson de récupération toutes les 2-3h de course. Même si la faible dénivellation laisse entendre une vitesse moyenne élevée, la prise de barres énergétiques n’est pas à exclure notamment celles qui possèdent 4 à 6g de protéines par barre. Vous trouverez l’explication de l’intérêt des protéines durant l’effort dans la partie « trail court à forte dénivellation » ci-dessus. Concernant les ravitaillements de l’organisation, je vous oriente sur mon article concernant les produits à prendre sur les ravitaillements.
Ravitaillement trail long à forte dénivellation
La stratégie alimentaire est primordiale, une étude sur l’UTMB® avait démontré que les nausées et vomissements étaient la 3ème cause d’abandon ! (travail Sylvain ISNARDON – Mémoire en vue de l’obtention du DIUMUM Faculté de Grenoble – Faculté de Toulouse). Alors, il y a des milliers de raisons expliquant ces problèmes (mécaniques par les efforts excentriques, les vibrations des impacts au sol…, psychologiques: stress, terrain anxiogène…d’où l’intérêt d’une préparation mentale, médicamenteux: AINS, ATB,…) mais mon expérience me fait concentrer sur trois principaux au niveau alimentaire:
- Eviter les allergènes, incluant par exemple le lactose (lait et dérivés), le gluten (blé, seigle, avoine orge…), minimum la semaine qui précède la course, optimum 3 semaines,
- Limiter (sans forcément les éviter) les gels énergétiques durant la course et éviter les barres en courant (important le terme « en courant »), elles doivent être mangées en marchant et en étant sur-mastiquées (et cela est plus facile en marchant) pour faciliter la digestion/assimilation,
- Eviter de manger un produit que vous ne connaissez pas ou que vous n’avez pas pour habitude de manger en chronique, de manière hebdomadaire.
Je vous certifie qu’avec ces 3 points, vous diminuerez significativement les troubles digestifs et ceci est valable quelque soit votre sport !
Concernant le ravitaillement sur ultra trail, il faut tendre le plus possible vers les bases (cf point qui lui est consacré), utiliser toutes les 2-3h soit une boisson de récupération, soit une barre hyperprotéinée (cf point « trail court à fort dénivelé » pour explications) et varier les arômes, les goûts pour éviter l’écœurement. Tout ce qui n’a pas un arôme sucré est le bienvenu tel que (liste non exhaustive… car tous les goûts sont dans la nature!):
- Les boissons énergétiques (cf.recette boisson énergétique maison) ou boissons de récupération salées,
- Les soupes, potages qu’on diluera avec de l’eau chaude si possible pour éviter des concentrations trop fortes en nutriments,
- La poudre de légumes (épinard, betterave,…) et/ou fruits (fraise, myrtille, kiwi…) et/ou plantes (ortie, gingembre…), lyophilisées auxquelles on ajoute de l’eau chaude en+/- grande quantité en fonction de la texture désirée au moment de la course,
- Les biscuits craquants sucrés (Petit beurre,…) ou salés type TUC,
- Les fruits protéoléagineux (noix, noisette, amande, pistache…) et de préférence leurs purées associées pour leur texture et digestibilité,
- Les gâteaux sport maison sucré ou salé (intéressant pour l’alternance sucrée/salée), pains d’épices, crêpe de l’effort (sucrée ou salée) => complet au niveau nutritionnel (lipides, glucides, protéines, épices: curcuma,….)
- Le jambon (cuit ou cru), la viande séchée, les fromages à pâte dure (emmental, gruyère, beaufort, comté…) seront appréciés pour leur apport en sodium, protéines mais aussi « psychologique »… Les aspects mentaux sont importants en ultra et la nutrition organoleptique (goût, texture, odeur…) est un facteur clé dans l’approche de la performance finale.
- Les fruits et leur apport énergétique sous forme glucidique, privilégiez les compotes (voir les purées de fruits,versant cru des compotes, dans un second temps) aux fruits entiers toujours dans un soucis de digestibilité évidente (la cuisson reste un paramètre permettant de prédigérer le fruit. Les fruits lyophilisés pourront être envisagés pour l’envie de certains traileurs, également les fruits séchés (dattes, mangue, pomme, ananas…), toujours en deuxième intention derrière les compotes,
- Enfin, les salades de féculents type riz, pâte, semoule, boulghour, quinoa, millet, amarante,…gnocchis, pomme de terre, patate douce… restent très appréciées pour leurs aspects gustatifs et « conviviaux ». Les céréales doivent être plus cuites que la normale pour faciliter toujours les aspects digestifs.
Conclusion sur les ravitaillements lors de trails
Outre le respect des bases, il est très intéressant de consommer une boisson de récupération toutes les 2-3h de course pour varier les arômes, la texture et surtout apporter des protéines intéressantes pour le récupération musculaire. Je rappelle toujours que le liquide est à privilégier au regard du solide concernant l’apport nutritionnel, la digestibilité reste un élément-clé concernant la performance finale, notamment en ultra.
Bonne course et prenez du plaisir !
Les autres disciplines abordées
- Alimentation au marathon
- Alimentation au trail
- Alimentation au triathlon
- Alimentation au marathon des sables
- Ravitaillement marathon
- Ravitaillement triathlon
- Alimentation au cyclisme
- Le Pack Marathon
Nicolas AUBINEAU
Diététicien Nutritionniste du sport et en clinique
Illustration issue du journaldemillau.fr