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Sans gluten dans le sport – Interview

Par Nicolas - 6 minutes de lecture
interview sans gluten

Les sportifs gagnent-ils à consommer sans gluten ? Peut-on devenir une star du tennis mondial comme Djokovic en mangeant comme lui sans gluten ? Effet de mode ou réalité bien fondé ? On entend de tout sur le gluten, et notamment dans le milieu du sport. Je vous livre quelques éléments de réponses sur ce sujet controversé en 6 questions/réponses.

Sommaire

Interview Men’s Health sur le sans gluten

1/ Concrètement, quelles sont les différences entre les personnes intolérantes au gluten (maladie cœliaque) et les personnes « seulement » sensibles à cette protéine ?

La maladie cœliaque ou intolérance au gluten est une intolérance permanente à une ou plusieurs fractions protéiques du gluten ayant pour conséquence une destruction des villosités de l’intestin grêle, source de malabsorption des nutriments en général. L’organisme libère des anticorps dirigés contre ces fragments et altèrent les parois de l’intestin.

Cependant, il faut distinguer l’intolérance au gluten avec les allergies au blé (ou au gluten), plus rares, qui intègrent des mécanismes immunitaires différents (réactions à l’IgE associé à l’œdème de Quincke par exemple).

Le gluten est une protéine de réserve contenue dans certaines céréales : blé (froment, épeautre, petit-épeautre, kamut, boulghour),  seigle, orge, avoine.

Les personnes qui vont être sensibles à cette protéine vont déclarer des symptômes intermédiaires (à différentes intensités) au niveau digestif (constipation, diarrhée, reflux, vomissements, ballonnement…), musculo-tendineux (crampes, fatigabilité, tendinites…), ostéo-articulaire (ostéoporose, douleurs articulaires…), mental (troubles de l’humeur…), métabolique (anémie, amaigrissement…)… Toutes les sphères de l’organisme peuvent être touchées.

2/ Existent-ils aujourd’hui des chiffres précis sur le nombre de personnes dites intolérantes au gluten en France ? Et les sensibles ?

Aux alentours de 550-600 000 personnes intolérantes au gluten en France. Concernant les personnes sensibles, cela est beaucoup plus flou, l’origine étant souvent multifactorielle, difficile de se prononcer et de faire une corrélation évidente entre certains symptômes et l’apport de gluten dans l’alimentation, qui plus est lorsque l’on intègre la notion de fréquence-quantité et la sensibilité individuelle propres à chacun.

3/ Pourquoi entend-on aujourd’hui beaucoup parler des régimes sans gluten ? Et pourquoi particulièrement dans le sport ?

Ce phénomène est à prendre avec du recul, car il est vrai chez certains, une minorité, et utilisé par effet de mode chez d’autres sans que ces derniers sachent véritablement la raison. Ce qu’il faut savoir néanmoins, c’est que la sensibilité peut être augmentée à l’effort.

Ensuite, sur un autre angle, il suffit de corréler performance sportive et « Régime sans gluten », si les athlètes qui gagnent l’utilisent, alors le « Sans gluten » aura le vent en poupe. Si les athlètes commencent à perdre avec, alors il aura moins de succès. Les corrélations sont trop souvent mono-factorielles, liées à un seul facteur causal, or la performance dans le sport est liée à beaucoup de facteurs nutritionnels et extra-nutritionnels (mentaux, tactique, technique, physique…). En conclusion, il y a pour qui cette diététique est nécessaire et d’autres non ou moins…

4/ Physiologiquement, quels peuvent être les bénéfices d’une alimentation sans gluten pour un sportif (quel que soit son niveau) ?

Les symptômes au regard d’une sensibilité au gluten étant variables selon les individus, les bénéfices le sont tout autant. Ce sont souvent, si c’est le cas, une atténuation des troubles digestifs type diarrhée associée généralement à une diminution plus ou moins importante de la fatigue, une limitation de la perte de poids (amaigrissement si c’était le cas) due à une minoration des phénomènes de malabsorption secondaire. Aussi, il existe d’autres avantages (non exhaustif) : une diminution du risque d’anémie par amélioration de l’absorption du fer, une diminution des troubles musculaires à type de crampes par exemple, d’ostéoporose sur le long terme… Cela est variable en fonction du « terrain » de chaque athlète.

5/ Les régimes sans gluten ont été médiatisés par certains champions (Djokovic notamment). N’y a-t-il pas un effet de mode derrière tout ça ? Existent-ils des risques, ou du moins des limites à manger sans gluten ?

Oui, très certainement. Il y a eu un effet de mode qui a orienté certains athlètes sur un modèle non justifié chez eux, mais avec éventuellement un « effet placebo » permettant de potentialiser la performance sportive. Pourquoi pas ! En tout cas, cela ne doit en aucun cas aboutir à des troubles du comportement alimentaire, car les modèles d’éviction sont des « starters » de tout premier choix pour inciter aux dérives des conduites nutritionnelles par la suite. Ce qui peut, in fine, aboutir à une malnutrition non souhaitée au départ.

Néanmoins, une diététique sans gluten bien orientée en qualité et quantité peut être très bien équilibrée et non déficiente. Cela doit être bien encadré.

6/ Quels conseils donneriez-vous à un sportif souhaitant tenter le sans gluten ?

Il faut partir sur une approche progressive dans le temps basée sur le rapport Fréquence/Quantité. En d’autres termes, on augmente paramètre par paramètre, une fois la fréquence (hebdomadaire généralement), une fois la quantité, et on réalise des corrélations éventuelles. Si aucun trouble significatif n’est décelé, l’éviction du gluten n’est pas justifiée.

Concernant la prise des aliments, choisissez d’abord des denrées naturelles sans gluten, brutes et unitaires, non transformées, et réalisez les plats vous-mêmes. L’éventail alimentaire est large.

régime sans glutenEn deuxième intention et en complément, choisissez les aliments où le logo « Epi de blé barré dans un cercle » est présent, cela certifie que le produit concerné est exempt de gluten. Avantage non négligeable, il existe de nombreux fabricants de produits sans gluten sur le marché. L’athlète sensible au gluten peut donc se faire plaisir : pain, pâtes, biscuits sucrés et salés, céréales, gâteaux, préparations pour pains, brioches,…

Enfin, je terminerai avec une remarque pour les personnes intolérantes au gluten qui doivent faire attention lorsqu’ils sont à l’extérieur ou de sortie (restaurant, collectivités, cercle amical…), mais aussi lorsqu’ils font leurs achats : produits alimentaires de la vie de tous les jours (pain, pâtes, biscuits, viennoiseries…). En effet, le gluten peut être présent sous forme directe (farine, semoule, crème, flocon…), sous forme d’additifs (liant, épaississant, anti-agglomérant…), ou par contamination croisée au niveau des chaînes de production.

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Nicolas AUBINEAU
Diététicien Nutritionniste du sport et en clinique